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Le théâtre regarde le cinéma
 
JEAN-LUC GODARD, LE PAYSAGE HUMAIN DU CINÉMA

PAR PASCALE SPENGLER
 
Je serai très heureuse que vous trouviez le temps de lire ce courrier, long certes. Cependant cette longueur est nécessaire car le temps que j'ai consacré à étudier fut la clef et la boussole pour explorer une œuvre tellement dense et elliptique que celle de Jean-Luc Godard. Avec un avion on ne voit jamais le ciel en entier alors qu'avec un bateau, cela est possible.
 
Je vous en remercie.
 
Godard est un auteur vers lequel il faut aller. Ce n'est pas un produit de consommation ""fast food". Son œuvre contient et qualités et vertus de son exigence. Ce n'est pas à Godard à aller vers ses lecteurs, c'est au lecteur d'aller vers cette œuvre et cela ne peut se faire qu'en le suivant pas à pas, en déchiffrant cet énorme palimpseste qu'évoquait déjà Baudelaire en son temps dans un de ses poèmes. Godard est un penseur de notre siècle, il l'a réfléchi à travers son cinéma. Godard pour celui qui prend le temps de lire son œuvre n'est pas hermétique. Il élabore un langage qui synthétise "le temps" qui n'est pas celui de nos montres que seul le média cinéma est capable de conceptualiser et de transmettre à ses lecteurs.

"Qu'est-ce que le cerveau humain, sinon un palimpseste immense et naturel ? Mon cerveau est un palimpseste et le vôtre aussi, lecteur. Des couches innombrables d'idées, d'images, de sentiments sont tombées successivement sur votre cerveau, aussi doucement que la lumière. Il a semblé que chacune ensevelissait la précédente. Mais aucune en réalité n'a péri. ” Toutefois, entre le palimpseste qui porte, superposées l'une sur l'autre, une tragédie grecque, une légende monacale, et une histoire de chevalerie, et le palimpseste divin créé par Dieu, qui est notre incommensurable mémoire, se présente cette différence, que dans le premier il y a comme un chaos fantastique, grotesque, une collision entre des éléments hétérogènes ; tandis que dans le second la fatalité du tempérament met forcément une harmonie parmi les éléments les plus disparates. Quelque incohérente que soit une existence, l'unité humaine n'en est pas troublée. Tous les échos de la mémoire, si on pouvait les réveiller simultanément, formeraient un concert, agréable ou douloureux, mais logique et sans dissonances.(…)" 
Les Paradis artificiels/VIII Visions d'Oxford - Le Palimpseste de Charles Baudelaire.
 

 
Tardivement
Cher tous
 
 
En relisant "l'imprescriptible" de Jankelevitch (cité "Dans le Noir du temps (du cinéma) : http://www.dailymotion.com/video/x1idxa_godard-dans-le-noir-du-temps_shortfilms" après un carton noir annonçant avec une écriture blanche : "les dernières minutes de la mémoire" : une courte séquence d'un film d'archive sur les camps de concentration où un cadavre décharné de femme est jeté  dans un camion de cadavres par deux soldats comme seront jetés dans un camion poubelle les livres qui ne témoignent d'aucun geste de charité, cette séquence tournée par Godard avec Anne-Maie Miéville, eux-mêmes acteurs, elle précède l'autre, elle-même sera précédée par un autre écriteau noir avec écriture blanche annonçant :" les dernières minutes de la pensée" , en observant sur les vidéos internet et en lisant la presse relatant les récentes émeutes d'Angleterre, les fluctuations boursières, et l'écriture du désastre de Blanchot, j'ai pu enfin faire tous les rapprochements concernant cette œuvre absolument inédite de cet immense artiste qu'est Jean-Luc Godard. 
 
Comme si enfin je pouvais toucher le sang de cette œuvre, son obsession, son endurance, sa patience, sa palpitation, sa respiration, son souffle magnifique,  qui la traverse de bout en bout au cœur des ténèbres de notre temps.

Au chapitre 3 B des Histoire(s) du cinéma, Godard rend un hommage émouvant à Henri Langlois : « Nous étions sans passé, et l’homme de l’avenue de Messine nous fit don de ce passé métamorphosé au présent, en pleine Indochine, en pleine Algérie. Et lorsqu’il projeta Espoir pour la première fois, ce n’est pas la guerre d’Espagne qui nous fit sursauter, mais la fraternité des métaphores ». Fraternité qui n’est que le prolongement de deux autres principes du film. D’abord, l’égalité entre toutes les images, qu’elles viennent de téléphones portables ou de caméras HD, d’un direct-to-dvd ou du Cuirassé Potemkine. Ensuite, la liberté de comparer avec l’incomparable, l’un des souhaits de Florine dans la deuxième partie. Liberté, Egalité, Fraternité : voici la formule de la métaphore. (Arthur Mas, Martial Pisani/ 1er juin 2010 (Merci à Jean-Louis Leutrat)

Là je suis intimement convaincue que je touche le bon bout de mon énorme travail d'enquête autour de l'œuvre de Godard. 

Je suis particulièrement émue d'aboutir à cette conclusion "les dernières minutes d'un certain cinéma sont en train de disparaître avec Jean-Luc Godard" sans espoir de retour, comme elles ont déjà disparu récemment avec Rohmer, Maurice Henri Joseph Schérer, un autre compagnon d'armes de Jean-Luc Godard, un des quatre mousquetaires  de la Nouvelle Vague. J'ai pu acquérir en plus une vison politique/poétique/historique tragique d'une époque celle du XXème siècle qui fintit et de celle qui commence avec ses difficultés et le travail qui sera à faire à l'avenir. Le plan de Jean-Luc Godard qu'il annonçait irréalisable, dans "Histoires du cinéma", il a pu le réaliser. Je comprends sa sérénité, son ironie qu'il donne à voir dans ses dernières interviews et interventions médiatiques. il est comme dirait Blanchot dans l'écriture du désastre "un pas au-delà" et Antoine de Baecque se trompe terriblement dans sa biographie en le décrivant misanthrope, triste et amère.

Tout se tient. "La fin du langage" clôturera de manière très cohérente le dernier film annoncé de Godard. Non pas pour une fin mais pour un nouveau recommencement, une aurore à venir, son "Morgenrot" tant attendu. 

Je vous remercie, vous tous qui m'avez suivi et quelquefois largement soutenu. Je suis contente de moi de ne pas avoir baissé les bras malgré les nombreuses tentations de découragement pensant ne pas être à la hauteur. Encore une fois c'est grâce à vous que j'y suis arrivée, bien sûr aidée en cela par l'immense travail de recherche disponible sur internet réalisé par des chercheurs passionnés de l'œuvre de Godard. Je m'emploierai donc dans les prochains jours à compléter cet écrit en indiquant les noms des précieuses personnes ressources qui sans le savoir m'ont aidé à y voir plus clair. Mais malgré tout je souhaitais et ceci grâce à internet vous transmettre les résultats de ma dernière étape de travail avant la production de "Passion Godard/Deuxième! les dernières minutes d'Adrienne". 

 
Le numérique a infecté le cinéma, mais l'infection est un phénomène ancien commente Godard avec beaucoup d'ironie. (voir image ci-joint extraite de Film Socialisme)
Nous assistons donc actuellement aux "Dernières minutes du cinéma" bref un certain cinéma est mort "sans espoir de retour" mangé par la publicité, l'argent du business nommons le ainsi l'argent de Monsieur Goldberg. Celui-ci s'est approprié l'ART, Godard dit l'Espoir.
 
Je comprends un peu plus l'attitude lucide de Godard cherchant son prix Suisse courageusement. J'ai vu ce reportage réalisé par une chaine allemande, avec son commentaire méprisant vis à vis de l'artiste, digne de celui que tient le médecin à Woyzeck. Mais Godard a conscience des chiens de garde de la télévision, avant de prendre son prix digne, comme le brave combattant non dupe qu'il est, il en a vu d'autres,  "un résistant" à sa façon, égal à lui-même, n'ayant jamais renié ses convictions, cultivant le secret espoir  qu'un jour il y ait plus de justice si ce n'est de justesse, émouvant, il ne veut pas déchoir,  du haut de ses 80 années, avec son écharpe rouge, il récite en allemand : "Morgenrot" qui figure dans Allemagne année 90. En voyant ce reportage, j'étais très émue car je voyais l'infamie, le cynisme, l'abjection du monde des médias à l'œuvre.

Morgenrot
Morgenrot
Leuchtest mir 
zum frühen Tod
Bald wird die Trompete blasen
dann muss
ich mein Leben lassen
 
Concernant Film socialisme je vous indique ce lien : http://www.independencia.fr/indp/10_FILM_SOCIALISME_JLG.html


pour les publicistes qui sont les acheteurs de l'ART, les messieurs Goldberg, de l'ART qu'évoquent Anne-Marie Miéville et Godard dans "The Old Space" les voici :

Revue -
  • Catalogues Christie's Pierre Berge & Yves Saint Laurent N° 0 - Beaux arts - 01/03/2009
Le rapprochement avec les dernières Minutes d'Adrienne et la passion Godard/Deuxième sera aisée à faire… une tragédie puisque le cinéma n'est pas arrivé à changer le monde. 
 
Par contre le cinéma de Jean-Luc Godard a su rendre compte du XXème siècle et du début du XXIème comme aucun historien n'a su le faire jusqu'à présent. Oui seul le cinéma comme média, et un cinéaste tel que Jean-Luc Godard avec sa théorie de rapprocher les images, et l'écriture, et la peinture, et la musique, et les archives, ont su accomplir ce pari insensé de convoquer la mémoire, sa complexité en la rendant visible, opérationnel annoncé dans le palimpseste comme programme par Baudelaire.
 

Vous avez deux choses à perdre : le vrai et le bien, et deux choses à engager : votre raison et votre volonté, votre connaissance et votre béatitude; et votre nature a deux choses à fuir : l'erreur et la misère. Votre raison n'est pas plus blessée, en choisissant l'un que l'autre, puisqu'il faut nécessairement choisir. Voilà un point vidé. Mais votre béatitude ? Pesons le gain et la perte, en prenant croix que Dieu est. Estimons ces deux cas : si vous gagnez, vous gagnez tout ; si vous perdez, vous ne perdez rien. Gagez donc qu'il est, sans hésiterPensées, Blaise Pascal 1670

 
La conclusion à laquelle j'arrive, Godard avec Anne-Marie Mieville, après bien des observations, rapprochements, recherches, et essais, annonce de manière prophétique la fin d'une époque et d'une Histoire avec sa multitude d'histoire(s). Et à celles-ci, ils leur rendent leurs derniers honneurs. Ils leurs rendent en quelque sorte justice, les sauvant de l'oubli, transmettant leur méthode pour les sauver de l'oubli,  citant les braves, ceux qui n'ont jamais renié même si la cause comme dirait Edward Saïd ou Mahmoud Darwich fut perdue.
 
JLG dans "the old space" énonce  :
 
Emprisonnée par la photographie,  c'est la peinture elle-même qui se suicide, et Soulages lui rendra les derniers honneurs après la guerre de 40. Oui du point de vue de l'histoire de l'art, le 20 ème siècle, c'est la guerre de Cent ans. Il faudra tout ce temps pour que le catalogue de la Redoute et le catalogue de Christie appartiennent au même monsieur. Et alors les espaces publicitaires occupent les espaces de l'Espoir et de la Madeleine de Proust.
 
Et dans film socialisme il nous conseille de retourner jusqu'au berceau de la civilisation, de faire de l'archéologie, de retourner à l'origine des choses, jusqu'à Ulysse et Homère, d'aller explorer chez les tragiques grecs, bref de refaire le chemin en retournant sur nos pas, dans le désert, en suivant l'exemple de son oncle comme d'autres chercheurs le font pour comprendre quelque chose à notre histoire, à la folie des hommes et à leurs rapports au pouvoir. 
 
Et pour encore mieux comprendre et bénéficier du travail de recherche accompli par d'autres chercheurs passionnés par l'œuvre de Jean-Luc Godard, je vous cite quelques éléments d'éclaircissement qui vous permettront de lire "film socialisme"entre les images et entre les textes, de voir l'invisible, toutes les légendes et les histoires qui se cachent derrière les images et les citations textuelles de "Film Socialisme".
 
Il n'est donc pas du tout anodin non plus que dans Film Socialisme, il cite : Deux plans du film d’Antonioni figurent dans la séquence consacrée à Naples, dans « Nos humanités ». Champ : la statue d’une Vierge à l’Enfant est filmée en contre-plongée. Contrechamp : un visiteur aux cheveux blancs, Antonioni en personne, s’avance vers cette statue. Le Regard de Michel-Ange ne fut pas tourné à Naples comme le laisserait supposer le montage godardien, mais dans la basilique Saint-Pierre-aux-Liens de Rome. C’est dans cette église que se trouve le célèbre Moïse de Michel-Ange qui inspire à Antonioni son avant-dernier film. Le cinéaste italien s’approche de la statue, la contemple, la caresse du regard avant de laisser ses mains glisser sur le marbre. JLG a souvent répété qu’en tant que cinéaste, il préfèrerait encore perdre l’usage de la vue plutôt que celui de ses mains, citant à nouveau dans Film Socialisme les mots de Denis de Rougemont : « Dans manifeste il y a main. Non pas un sentiment drapé, un idéal, un sourire qui congédie l’univers ».

Il n'est donc pas du tout anodin non plus que dans Film Socialisme, il cite Jean-Daniel Pollet et son film "Méditerranée" dont le texte est de Philippe Sollers. Dans l’article qu’il consacre à Méditerranée dans les Cahiers du Cinéma, en 1967, Godard avoue son admiration pour le film, et n’hésite pas à comparer le jeune Pollet à Orphée. Aussi curieux soit-il, le compliment n’est pas hasardeux : ce qui retient l’attention de JLG, c’est la manière dont le film transforme un voyage touristique en traversée mythologique, crée une Méditerranée légendaire à partir d’images documentaires. Film Socialisme est aussi, à sa manière, un recueil de légendes.

Film Socialisme est aussi, à sa manière, un recueil de légendes. Celle de l’or espagnol par exemple, considéré comme une malédiction puisqu’il a fait la ruine des Indiens, des espagnols, a servi aux nazis et fut, pour les deux tiers, volé aux soviétiques. Sans compter que le collier que porte Alissa, fait de pièces d’or sans doute prises au trésor par son grand-père, la condamne à la fin du film à la mort. Dans Face of Terror, obscur film d’action cité au générique de Film Socialisme, c’est la disparition, à Barcelone, d’une jeune américaine dans une étrange affaire de terrorisme, qui pousse son frère à venir mener l’enquête sur place. Palabras para Julia, le poème de José Agustín Goytisolo chanté par Paco Ibañez, déjà entendu au début du chapitre 2 B des Histoire(s) du cinéma, revient à deux reprises dans Film Socialisme. Il cache une autre disparue, Julia, la mère du poète, tuée dans un bombardement à Barcelone en 1938. Il y a une malédiction autour de la capitale catalane dont sera victime à son tour Mr. Arkadin dans le film de Welles. Barcelone est le lieu d’un événement mystérieux qui marque à la fois le terme et l’origine du voyage. Dans cette curieuse composition en prisme qui est aussi une « porte étroite », tout commence et tout finit avec la guerre d’Espagne, comme si on pouvait y lire, à l’avance, le destin du vingtième siècle. (Arthur Mas, Martial Pisani/1er juin 2010/Merci à Jean-Louis Leutrat)

 

14-Enfance de l'ART
 
Qui donc es-tu ?
Je suis la personne qui parle
Celle qu'on nomme je
Et qui de corps en corps
De visage en visage
Et même
En toute vie, forme
A le moment pour acte
et ne sait faire
Qu'être
 
 
Mort ai-je dit ?
Il n'y a pas de mort.
Seulement un changement de mondes. 
 
Au dernier soir sur cette terre : "discours de l'homme rouge" de Mahmoud Darwich
 
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Notre direction celle que je souhaiterai que nous prenions puisqu'il s'agit d'aller chercher les images dans le désert comme le conseille si sagement Godard dans "Film et socialisme" en montrant une image de son oncle Theodore Monnod, né le 9 avril 1902 à Rouen et mort le 22 novembre 2000 à Versailles, est un scientifique naturaliste, explorateur, érudit, et humaniste français. Il est « le grand spécialiste français des déserts», « l'un des plus grands spécialistes du Sahara au XXème siècle» et « bon nombre de ses 1 200 publications sont considérées comme des œuvres de référence1. »

Pour Jean Dorst, né à Mulhouse le 7 août 1924 et mort à Paris le 8 août 2001, est un ornithologue français, Théodore Monod « a été bien plus qu'un savant naturaliste à la curiosité toujours en éveil. C'était un humaniste au vrai sens du terme, un penseur, un philosophe et un théologien. »

 
A partir d'un modèle de forme celui d'une conversation musicale pour atteindre notre objectif, avec à l'intérieur un poème cinématique sous forme de fugue qui parle des "Dernières minutes du cinéma…avant que tout retourne à la nuit…dans l'attente d'une nouvelle aurore comme l'aurore tant attendue dans l'Electre de Giraudoux et celle tant attendue par Jean-Luc Godard et Anne-Marie Miéville, et par beaucoup d'entre-nous aussi.
 
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Deux valets sont sur le promenoir, longé par la rampe en fer forgé. Ils sont pris en plan moyen dans la pénombre, depuis une pièce obscure dont l'ouverture des portes crée un second cadre autour d'eux. Les lustres du grand hall illuminent le fond du champ. Le valet que nous connaissons tend un plateau à son collègue.

VALET
-Je te rejoins. (L'autre valet prend le plateau et sort du champ. A Carmen allongée hors champ.) Quelque chose ne va pas mademoiselle ? (Le valet s'agenouille)
(227 Plan rapproché de Carmen étendu sur le sol, la main du valet posé sur son épaule). Mademoiselle. (Bruit de marteau piqueur sur la bande son).
CARMEN (relevant la tête).
-Comment ça s'appelle quand il y a les innocents dans un coin et les coupables dans l'autre ?
VALET 
-Je ne sais pas mademoiselle
CARMEN
-Cherchez, imbécile. (Le bruit de marteau piqueur s'arrête.)
229 Plan rapproché poitrine du valet
VALET
-Je ne sais pas mademoiselle.
CARMEN
-Mais si quand tout le monde a tout gâché, que tout est perdu, mais que le jour se lève, et que l'air quand même se respire.(La musique reprend)
VALET (après un temps de réflexion)
-Cela s'appelle l'aurore. (229 Plan d'une mer calme et ensoleillée. Léger bruit de mer.) Mademoiselle
Carton générique
Un film de Jean-Luc Godard
Mer-extérieur jour
La mer calme et ensoleillée
Carton générique
232 IN MEMORIAM SMALL MOVIES*
 
*Fin de la bobine 5A
 
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Notre contenu : Un monde disparait et devient une étoile, une légende. Une réalité disparaît et devient une légende.
Comme Van Gogh le disait 
 "Un jour, nous prendrons la mort pour nous en aller dans une autre étoile"

12-le Vieux monde
C'est le futur qui décide si le passé est vivant ou non. Un homme qui a pour projet de progresser définit son ancien moi comme le moi qui n'est plus et s'en désintéresse. Au contraire le projet de certains implique le refus du temps et une étroite solidarité avec le passé. La plupart se trouvent dans ce cas ; ils refusent le temps parce qu'ils ne veulent pas déchoir
 
14-Enfance de l'ART
-On n'a pas fait grand chose encore
-On a visité quelques étoiles
-Cette image que tu es, que je suis, Benjamin en parle, où le passé entre en résonance le temps d'un éclair avec le présent, pour former une constellation
-L'œuvre d'art dit-il, est l'apparition unique d'un lointain, aussi proche soit-il. Mais je ne suis pas sûr de comprendre : proche égal de lointain…
-On dit souvent : à l'origine, il y avait… L'origine c'est à la fois ce qui se découvre comme absolument nouveau et qui se reconnait comme ayant existé de tout temps. L'ensemble des idées, d'après Benjamin, constitue un paysage premier, toujours présent.
-Même lorsque les hommes l'ont oublié, et auquel il s'agit de revenir.
-Il y a les étoiles, qui sont aux constellations ce que les choses sont aux idées. On aurait pu dire "leçons de choses" au lieu "d'exercices".
-Exercice de pensée artistique, on a dit
-L'idée c'est leur rapprochement…de même que les étoiles se rapprochent, même en s'éloignant les unes des autres, tenues par des lois physiques, par exemple pour former une constellation, de m^$eme, certaines choses, pensées se rapprochent pour former une ou des images.
-Alors pour comprendre ce qui se passe entre les étoiles, entre les images, il faut examiner en premier des rapprochements simples.
Tout est donc loin, mais en même temps tout est donc proche. Et sans doute entre l'infiniment   petit et l'infiniment grand on finira par trouver une moyenne. L'homme moyen sans doute. Ce qui a été sera et ce qui sera a été.
19 personnes assistaient à la Crucifixion, 1400 à la première représentation d'Hamlet et deux milliards et demi à la finale de la Coupe du Monde. Rt l'image de tous ses possibles.
Travailler artistiquement ne consiste pas seulement à observer, accumuler des données expérimentales, et puis en tirer une théorie, tableau, roman, film, etc.
-La pensée artistique commence par l'invention d'un monde possible, d'un fragment d'un monde possible, pour le confronter par l'expérience, par le travail, peindre, écrire, filmer, avec le monde extérieur. Ce dialogue sans fin entre l'imagination et le travail permet que se forme une représentation toujours plus aiguë de ce qu'il est convenu d'appeler la réalité.
Nous sommes tous perdus dans l'immensité de l'univers. Nous avons perdu notre pays natal, nous n'avons aucun lieu où aller, ou pis encore, trop d'endroits où nous rendre.
-Nous sommes perdus non seulement dans les profondeurs de l'univers, mais dans celle de notre propre esprit.
-Quand les hommes vivaient sur une seule planète, ils savaient où ils étaient. Ils avaient une mètre pour mesurer, ils avaient leur index pour connaître la direction du vent. Mais à présent quand nous pensons savoir où nous sommes, nous sommes perdus : ou il n'est pas de sentier pour revenir chez nous, ou dans bien des cas, nous n'avons pas de patrie qu'il vaille la peine de regagner. Nous n'avons plus de foyer. L'espèce humaine a éclaté, s'est dispersée, se disperse encore parmi les étoiles. Notre espèce dans son ensemble, ne supporte pas le passé, beaucoup d'entre nous détestent également le présent, et nous n'avons qu'une seule direction, l'avenir qui nous éloigne de plus en plus du concept de patrie, de foyer.
-Notre espèce est faite dans son ensemble de vagabonds incurables, nous refusons tout ce qui nous lie, tout ce à quoi nous pourrions nous raccrocher. Et cela jusqu'au jour inéluctable, j'en suis sûr pour chacun de nous, où nous comprendrons que nous ne sommes pas libres, comme nous le pensons mais perdus. C'est seulement quand nous tentons de nous rappeler, avec notre mémoire-ancestrale, où nous sommes allés, et pourquoi, que nous comprenons pleinement à quel point nous sommes perdus. Est-ce qu'on n'a pas oublier de parler du tournant décisif de la peinture ?
-Après, là on est dans les technologies du futur.
Mais nous, en quittant la Terre, en rejetant, en méprisant la planète natale pour aller vers des lointaines étoiles plus brillantes, nous avons grandi énormément notre milieu, et nous n'avons pas ces quelques millions d'années. Dans notre hâte nous n'avons plus le temps…
-Quand Jean-François Millet peint deux paysans qui prient dans un champ et qu'il appelle cela "l'angélus" la légende correspond au réel.
-Quand Francis Picabia dessine un boulon et l'intitule "Portrait d'une jeune fille américaine dans l'état de nudité", la légende ne correspond plus au réel.
-"Ça m'est égal" dira Picabia, après Duchamp et avant Wahrol, et pareillement le patron de la brasserie de la gare en présentant la carte de desserts.
Le tournant décisif de la peinture était là. Le deuxième. Le premier, c'est quand les peintres ont décidé de peindre l'éternel féminin ; on dira que c'est presque au début, mais pas contre la Vierge. Alors des légendes sacrées, on a passé à l'histoire naturelle, et j'ai comme le sentiment que les légendes se sont vengées. L'image aujourd'hui, n'est pas ce que l'on voit mais ce qu'en dit la légende. C'est la publicité moderne. "Tristes tropiques" écrit Lévy Strauss, et c'est ce qu'on pensé les ours de tout à l'heure et l'homme qui marche. J'ai lu quelque part que Chardin disait l'art, qu'il ne savait pas ce que c'était ou alors une île dont il avait entrevu les rivages de loin. Alors qu'Andy Warhol déclare que l'art est un marché pour acheter et vendre. Et alors le vrai combat commence, celui de l'argent et du sang. Du point de vue de l'histoire de l'art, Quand Malevitch installe un carré noir sur la toile blanche, je ne crois pas que c'est la guerre de 14 qui impose le deuil. Emprisonnée par la photographie,  c'est la peinture elle-même qui se suicide, et Soulages lui rendra les derniers honneurs après la guerre de 40. Oui du point de vue de l'histoire de l'art, le 20 ème siècle, c'est la guerre de Cent ans. Il faudra tout ce temps pour que le catalogue de la Redoute et le catalogue de Christie appartiennent au même monsieur. Et alors les espaces publicitaires occupent les espaces de l'Espoir et de la Madeleine de Proust.
-Et la dernière Citroën s'appellera "Picasso".
Cependant j'ai le sentiment que quelque chose résiste, quelque chose d'original, que l'origine sera toujours là, et qu'elle résiste.
Anne-Marie Miéville et Jean-Luc Godard dans "The old Space"
 
Récit de JL Borgès qui figure dans le livre : "des êtres imaginaires "
A BAO A Qou
 
 
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Oui notre monde d'autrefois s'est écroulé autour de nous et il n'en reste pas grand chose
On s'est d'abord cru perdus
Mais je crois qu'avec le temps, nous en sommes venus à nous rendre compte que cette perte n'est pas entièrement mauvaise.
Peut-être pas mauvaise du tout.
Et finalement, au lieu de perdre, nous avons gagné l'occasion de prendre un nouveau départ.
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les coquelicots rouges disparaissent aussi des paysages
 
Ce qu'elle a bu du beau sang cette terre. 
Sang d'ouvrier et sang de paysan.
Car les bandits, ceux qui causent les guerres.
N'en meurent jamais, on ne tue que les innocents.
La butte rouge c'est son nom, le baptême se fit un matin
Ou tous ceux qui montaient roulaient dans le ravin.
Aujourd'hui, il y a de la vigne, il y pousse du raisin
Qui boira ce vin, boira le sang des copains
 
 
avec mes remerciements
 
pascale spengler
 
 
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Fugues…
"dans le noir du temps"
 
un travelling musical
un poème cinématique…
 

Allez Arvo Part pas, reste là, au lieu de faire des travellings musicaux de folie dans tous les se-sens.

Dans le noir du temps, film réalisé par Godard et Anne-Marie Miéville en 2003, avec tout du long le Spiegel Im Spiegel d’Arvo Part…un poème cinématique.

 
Et maintenant demeure la question le théâtre regarde le cinéma

cineastes.net

Dans le noir du temps / critique, février 2003 
film de Jean-Luc Godard et Anne-Marie Miéville - 2003

— par Colas Ricard —

Ce film court de Godard et Miéville, fait partie d'un film collectif. Godard et Miéville acceptant de le présenter de manière indépendante, il est donc possible de le critiquer indépendamment des autres séquences.
 

Description sommaire


Image début (titre) : "Dans le noir", puis "du temps"

Le film est un mixage des sons et images suivants :

Images
- des mots blancs sur fond noir ("dernières minutes de…" : "le courage", "la peur", "le silence", "le cinéma"…)
- quelques autres mots ("vivre sa vie", "l'amour", "soir dit-il, soir dit-elle"…), un titre d'un CD toujours de la même maison d'édition musicale avec laquelle travaillle Godard qui est un ensemble médiéval
- une séquence narrative : on remplis des sac poubelle de livres, les dépose hors d'une maison, des éboueurs jette des sacs poubelles plein dans leur camion.
- des d'images (extraits de films divers de Godard, Pasolini, Dreyer…) à caractère violentes (visage + sang, scène de torture, christ en croix…)
- des images diverses plus calmes : des visages, une sculpture animée de Tinguely, une flamme devant de la matière…

Sons
- une musique classique au piano (Beethoven ?) quasi permanente
- quelques autres musique (chanson, orgue…)
- un peu de silence
- des sons (sons "directs", coup de feu…)
- quelques voix

Image de fin : "Par JLG AMM"

 
 

La mort du cinéma


Les premiers mots apparaissent "Dans le noir", effectivement on est au cinéma dans le noir.
Deux mots "du temps" viennent compléter les trois premiers pour composer le titre du film "Dans le noir du temps". Godard à souvent comparé le cinéma à du temps.
Il est donc déjà question de cinéma.

Vers le deuxième tiers du film apparaîtra à l'écran "Dernières minutes du cinéma"
Il est donc encore question de cinéma, de sa mort annoncée.

Tous les extraits de films (ou presque) composant la bande image, sont retravaillés numériquement. Les images pellicule ont donc été télécinématées puis kinescopées. Opération plus compliqué et plus coûteuse qu'une simple copie standard.
Cela permet à Godard d'une part de retravailler ces images (augmenter le contraste, modifier ou faire baver certaines couleurs.).
D'autres part ces images s'affichent comme numérisées (par ces modifications, par le grain vidéo très visible etc).
Cette numérisation évoque ce qui va tuer le cinéma, un certain cinéma du moins : le numérique.
C'est désormais une banalité de dire que le cinéma va devenir sous peu entièrement numérique. Cela est parfaitement évident et inéluctable puisqu'il y a de forts intérêts économiques en jeu. Considérant les évolutions technologiques comme des progrès et donc les anciens procédés comme périmés, l'économie tends à faire disparaître ces derniers.

Vers la fin du film, on trouve le plan d'une sculpture animée de Tinguely : sur une scène de théâtre, un écran de tissu blanc est tendu et détendu plusieurs fois par un squelette de fer (accompagné du bruit important de la machine).
Ce plan peut évoquer un certain cinéma mis à mal. Depuis les années 50, en France, avec Le Film est déjà commencé ? de Maurice Lemaître l'écran même du cinéma est remis en cause par une branche du "cinéma expérimental" : le cinéma élargi (1) (ou cinéma étendu, ou expanded cinema). On trouve par exemple dans cette pratique cinématographique des projections multi-écrans, des projections rejetant la frontalité de l'image (utilisant plusieurs murs ou dans l'espace), des projections sur d'autres types de surfaces (mur, eau, corps etc), des projections intégrant d'autres disciplines (comédiens, danseurs…) ou inversement des projections hors de la salle de cinéma (théâtre, rue…) etc
Le cinéma numérique d'aujourd'hui (qui un peu paradoxalement contribue à faire ressortir de l'ombre le cinéma expérimental, un peu trop vite évincé de l'histoire officielle du cinéma) va aussi dans ce sens. Il n'y a plus de salle. Le numérique est partout (cinéma, télé, ordinateur…) et tend à faire disparaître la frontière cinéma/vidéo.

La séquence narrative (début du film) où l'on semble se débarrasser de tous ses livres, évoque la disparition de la littérature, ou plus radicalement des mots. Et il y a en effet très peu de dialogues (ou monologues) dans ce film.
Car avec une partie du cinéma expérimental qui ressurgit aujourd'hui, et une partie de l'art vidéo qui s'immisce de plus en plus dans le cinéma, la parole n'est dors et déjà plus obligatoire dans un film, comme ce fut un peu trop souvent le cas dans le cinéma dominant.
Les mots "soir dit-il", et "soir dit-elle" font sans doute référence au nouveau roman, à la déconstruction que celui-ci à opéré sur le roman (comme la déconstruction opérée par Godard dans le cinéma du récit), donc finalement à un début de déchéance.

Bref pour résumer ce film évoque la mort d'un certain cinéma : le cinéma des mots ou de la parole, de la salle, de l'écran blanc, de la pellicule… et nécessairement avec tout cela la disparition d'une manière de faire des images.
Et le film intègre tant ces images vouées à disparaître (Dreyer…), que des images de ce qui se multiplie sur nos écrans (scènes de violences).

La dernière image, une flamme de bougie devant de la matière, pouvant ressembler à un très vieux manuscrit que quelqu'un tente de déchiffrer, pourrait être l'embryon de ce nouveau cinéma à venir, ou bien l'annonce très en avance, de l'ancien cinéma, celui en train de mourir, qu'il faudra un jour déchiffrer comme de vieux manuscrits.

 
 

Un traveling musical


En plus de la mort du cinéma, d'autres thèmes sont évoqués, invoqués ou convoqués dans ce film. La violence du monde notamment.

Par des thèmes, nourris de l'actualité cinématographique et politique, on pourrait voir une manière de Godard de renouer avec des films à caractère politique.

On pourrait peut-être résumer ainsi le message "politique" du film :
Nous vivons dans un monde violent, de plus en plus violent (cf les nombreux fragments image et son de scènes de violences : de la scène de torture du Petit Soldatde Godard, à la crucifixion de La Passion selon Saint Matthieu de Pasolini, en passant par les camps de la mort)
Il nous faut tant bien que mal "Vivre sa vie" (autre auto-citation)
Seul "L'Amour" (2) sauve le monde et/ou le sacrifice et/ou la résurrection (image du christ en croix de La Passion selon Saint Matthieu)

Cette analyse générale, peut aussi s'appliquer au particulier, à Godard et Miéville, proches de leur propre fin. Ce film est une sorte de testament, de suicide, ou d'auto-sacrifice.
«Pour renaître, il faut d'abord mourir» dit Salman Rushdie dans Les Versets sataniques. Cette citation n'est pas dans le film, mais aurait pu y être.
Car c'est ce que le film semble préconiser, ou du moins annoncer. Le cinéma, l'homme ou la société doit ou va mourir, au moins partiellement, avant de renaître.
Cette analyse est du reste parfaitement en accord avec la tendance théologique actuelle de Godard et Miéville.

Ce film est entièrement conçu comme une sorte de ciné-poème. On y retrouve apparemment les éléments de la poésie : densité, polysémie, etc
Cette poétique se développe à partir d'éléments proprement cinématographiques des images et des sons. Il y a aussi des mots (en image ou en son). Mais Godard et Miéville se taisent de plus en plus, et tentent vraiment de faire parler l'image pour elle même. Godard l'a souvent revendiqué mais finalement assez peu fait, le son ou la parole menant presque toujours le sens de ses films.

Mais quelque chose vient troubler ce ciné-poème. Si Godard et Miéville savent se taire, ils ne savent pas être silencieux : une musique (quelques notes au piano) vient pendant la presque totalité du film se rajouter à ces images. D'autres sons ou musiques interfèrent. Mais cette musique au piano domine, par sa constance.
Finalement, l'ensemble du film, avec cette musique douce et constante, ces cartons blanc sur noir, répétitifs et systématiques, et par sa durée aussi, fait penser à une bande annonce d'un long métrage.
Or une bande annonce n'est finalement rien d'autre que de la publicité pour un long métrage. Et effectivement le film pourrait aussi, par la musique et son esthétisme, faire penser à un clip ou un spot publicitaire.
Car la musique tend, à "poétiser" le film, mais dans le pire sens du terme, cette fois-ci, digne d'une "poésie de gare". Cette musique (diffusée assez doucement) renvoie à la musique diffusée dans les supermarchés, pour combler le vide effrayant du silence.
Cette musique tend donner une légèreté au film, à faire oublier la puissance violente des images qui sont montrées. Et en même temps cette musique guide l'émotion du spectateur vers le pathos, en jouant sur sa corde sensible. Elle emphatise le film.
Ce film est à l'opposé de la conception brechtienne du récit (qui fut un temps celle de Godard) : on est dans la pure émotion, sans aucune distanciation.
En outre cette musique devient assez vite inutile. Elle crée une couche, une nappe sonore (parce que constante (3) ) qui crée finalement un obstacle pour entrer vraiment dans le film, dans le corps du film. Et si toutefois on y parvient, cette musique finit par gêner comme un corps étranger, quelque chose de superficiel (même si c'est du Beethoven) rajouté en fond sonore.



Un plan, et un seul sauve le film. Sur une image des camps de la mort, la musique s'arrête. Un coup de feu, puis encore du silence. Une voix s'élève (un chant) puis la musique au piano reprend.
Cette image à imposée le silence. Cette image est trop chargée de sens pour lui ajouter autre chose, à fortiori une "musique de supermarché".
Mais le plan précédent (une autre image des camps de la mort) n'a pas eu la même chance.
Mais ce silence ne dure qu'une dizaine de seconde et c'est à peu près, hors générique, le seul silence du film.

Ce plan fait penser à cet autre plan, du Gai Savoir (1968), où Godard annonce "et maintenant une minute de silence", il la tiendra 20 secondes maximum. (juste après il annonce "une minute de silence d'image", il tiendra un noir d'environ 40 seconde). Pourquoi pas une vrai minute ? Le silence est-il si difficile au cinéma dans un film sonore ? (D'autres cinéastes ont montrés que non).

Mais surtout, après ce très court silence, la musique reprend (camouflée par un chant) et continue comme si de rien n'était.
On se croirait à la télévision, au journal télé : on nous montre des crimes entre le sport et le résultat du loto. Tout est banalisé.

Finalement cette musique (et particulièrement la reprise de la musique) fait bigrement penser à ce fameux travelling de Kapo (4) . La musique nous accompagnant (nous donnant la main) ici à travers le chaos du film, comme le fait un travelling. Si un travelling est affaire de morale, une musique ne l'est pas moins.
La morale n'est peut-être pas une valeur si judicieuse. Car celle-ci s'accompagne souvent de dogmes, notamment empreint d'une certaine religiosité (liée au christianisme notamment, à son puritanisme et son ascétisme) mais il n'en reste pas moins, que morale ou non, cette musique fait de ce film, au mieux une sorte d'avatar de film intellectuel bien pensant de gauche, et au pire, un joli clip bien inoffensif.



C'est sans doute aussi, à cette idée d'un testament qu'il faut rattacher cette phrase intégrée au film : "si je veux la gloire, si je veux être aimé, je ne suis pourtant pas coupable de le désirer, de ne désirer que cela"
Peut-être Godard ou Miéville, cherchent t-il par avance à se faire pardonner quelque chose.

Dans le très éclairant Ici et ailleurs (1976), Godard disait "le son prend le pouvoir", "on à mis le son trop fort" et encore "le son trop fort a fini par broyer la voix qu'ils voulaient faire sortir de l'image".
Ici, ils ont mis la musique trop forte, trop douce, ou trop longtemps.

 

Colas Ricard, février 2003.

 


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notes :

(1) 
Citons entre-autres : Maurice Lemaître, Anthony Mc Call, Werner Nekes, William Raban, Tony Conrad, Cellule d'intervention Métamkine, Molokino, Zur, Yann Beauvais, Jürgen Reble, Jean Le Gac, Trisha Brown, Eija-liisa Ahtila etc…

(2) On retrouve cette thématique de dans d'autres films de Godard ou par exemple dans À travers le miroir d'Ingmar Bergman et Trois Couleur : Bleu de Krysztof Kieslowski. Tous puissant leur source dans Le Cantique des cantique de la Bible.

(3) Godard a su pourtant dans d'autres films, monter la musique, là il se contente de la plaquer.

(4) cf le célèbre texte de Jacques Rivette paru dans le numéro 120 des Cahiers du Cinéma à propos du film Kapo, de Gilles Pontecorvo se passant dans un camp de concentration : "Voyez cependant, dans Kapo, le plan ou Riva se suicide, en se jetant sur les barbelés électrifiés : l'homme qui décide, à ce moment, de faire un travelling avant pour recadrer le cadavre en contre-plongée, en prenant soin d'inscrire exactement la main levée dans un angle de son cadrage final, cet homme n'a droit qu'au plus profond mépris." (Les Cahiers du Cinéma, n°120, Juin 1961)



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