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La fonction sociale de la danse dans la société algérienne

 

Par Habib Boukhelifa, critique dramatique, metteur en scène et enseignant

 

         La totalité de l’univers fonctionne merveilleusement dans un rythme structurant magiquement touts les mouvements de la vie.

Le corps élément à la fois physique et chimique, faisant partie de cette univers fonctionne lui aussi dans un rythme. L’homme vit de la naissance à la mort dans le rythme. La communauté humaine des l’aube de sa création pratiquait nécessairement la danse qu’on trouve dans les différents rituels religieux et les multiples manifestations sociales des différents groupes sociaux, pratiquement dans toutes les culture qu’elles soient dominantes ou dominées.

Dans la société humaine les comportements sociaux des différents rites peuvent avoir une explication dans une approche socio anthropologique de la culture des corps et de redonner un sens à nos expériences humaines, même dans leurs formes les plus primitives.

Dans la continuité des travaux de « Marcel Mauss »1, Henri Hubert, et Emile Durkheim que le rite est un élément essentiel de la régulation des rapports sociaux impliquant cohésion et intégration, liens et communauté.

Le rite peut-être défini comme «  l’ensemble des cérémonies du culte en usage dans une communauté »2 qui  obéissent généralement à un support musical ou le rythme comme nous l’avons évoqué dégage fondamentalement le lien naturel entre le corps et les mouvements expressifs de danse, toujours de caractère sacré et symbolique.

Le rapport étroit entre le milieu culturel d’appartenance et le type de danse constituent la personnalité de base manifestant une résultante des formes et des contenus (caractères des mouvements brusques, costumes, couleurs, fétichismes etc.…) une expression de communication permanente qui jouent le rôle de défense et de pérennité du groupe social.

1-       « Représentations collectives et diversité des civilisations. » Marcel Mauss édition minuit Paris 1968

2-       « Rituel et prétheatre  in histoires des spectacles » Andre schaeffner édition Gallimard Paris 1965

 

Il est important d’ajouter qu’avec Claude Lewis Strauss      « qu’il s’agit d’un ensemble de conduite individuelles ou collectives relativement codifiées ayant un supports corporel, verbal et gestuel, postural à caractère plus ou moins répétitif, à fortes charges symbolique pour leurs acteurs et généralement pour leurs témoins »3 fondées sur une adhésion mentale éventuellement non conscientisées

Tout spectacle de danse qu’il soit contemporain ou traditionnel peut avoir une des figures de nos rites et habitudes profanes ou se joue la répétition d’une mise en scène des corps qui nous transposent dans l’émotion, c'est-à-dire le moment magique ou toutes la communauté adhère sans trop réfléchir, ou se qui se passe devant vous vous force à bouger, vous déplace, parce que on vous raconte «  des histoire de corps, celle de votre autre corps » ou bien la rencontre possible avec le corps de l’autre.

Edgar Morin pourrait qualifier la danse contemporaine d’objet complexe dont l’intérêt entre autre est de nous obliger à «  affronter l’incertitude »mais également à faire converger ou mettre nos savoirs en interaction. Déconstruction de nos repères spatiaux de la possibilité de faire corps avec soi-même et la communauté.

La danse apparaît dans un apparent désordre, une reconstruction de l’imaginaire d’un autre rapport à l’autre .Chaque corps renvoyant à de l’ordinaire, mais aussi à l’originalité de chacun ce que j’appelle « esthétisation de l’ordinaire et du quotidien  »4

« 3 L'Homme nu » Claude Lévi Strauss, Paris, édition Plon, 1971.

4 « L'Homme nu » Claude Lévi Strauss, Paris, édition Plon, 1971

La danse dans la société Algérienne obeillit à deux comportements sociaux presque opposés. L’un offre la possibilité de visualiser la valeur sociale de danser afin d’exprimer fortement et renforcer les liens sociaux qui se caractérise par l’acte de danser collectivement, dans les fêtes traditionnelles la danse peut des moments L’impression de vie La reconnaissance de soi se fait de manière fugitive et même surgissent d’autres images corporelles, celles de nos réalités diverses et contradictoires, celles de l’incompris. Le jeu de reflet permet l’émergence momentanée et éphémère de vérité et avoir une valeur sociale importante malgré les hésitations à l’adhésion. L’autre comportement peut avoir un jugement fondamentalement négatif à l’acte de danser. Un ensemble de préjugés qui  font de cet acte un acquit réservé exclusivement à la femme. Dans ce cas la danse devient subversive et surtout lorsque intervient fortement l’inconscient collectif religieux. C’est d’ailleurs la problématique de toute expression artistique, encore plus celle du corps en mouvement musical. La visibilité de celui-ci entraîne automatiquement une nudité imaginaire prohibée par l’interprétation globale et unilatérale des textes religieux. Ce comportement sexe affectif souligne le désir de s’offrir aux autres. Au fait ce divertissement n’est entre autre que l’immense désir d’évasion et de liberté.

Certes il y a une morale conflictuelle dans le rapport entre les hommes et les femmes dans notre société qui dresse toujours un mur de séparation entre le male et la femelle. La danse dans la société Algérienne reste essentiellement de goût féminin surtout quand il s’agit de danser individuellement devants le regard des autres. une peur inconsciente d’être dévalué comme male et atteint dans sa virilité que l’homme ressent au plus profond de lui-même .

Les hommes dansent mais collectivement. Une nécessité permanente d’exprimer le désir de liberté et son appartenance au groupe social.

Les danses traditionnelles dans la société algérienne ont une valeur sociale identitaire. Chaque région possède ses propres danses (el-alaoui, chaoui, tendi, el-kbaili, edziri, tlemçani etc.…) expriment au fond la pérennité de la communauté et renforcer les liens sociaux.

L’inconscient collectif religieux a fini par façonné l’adhésion partielle à l’acte de danser et par cela même à habiller les corps en mouvement afin d’éviter la nudité imaginaire et le désir. la danse n’est accepté totalement que lorsqu’elle remplit sa fonction sociale et marquer les contours de l’identité collective .il reste que parfois les hommes dansent avec leur mère, mais nullement avec leurs épouses .cette inhibition pérennise l’acte de danser dans la société.

La société Algérienne peut-elle accepter la nudité du corps ? Cette nouvelle culture qui apparemment se forme de plus en plus marque également les signes de la démocratisation de la société et donner un sens esthétique à la danse.

L’état algérien mène depuis l’indépendance une véritable politique louable à rendre visible l’invisible par la création du ballet national qui est chargé de promouvoir la culture de la danse. L’entreprise du Ballet National une institution officielle publique sous l’égide du ministère de la culture fait des efforts considérables à faire prévaloir les arts de la danse. Les algériens dansent mais autrement que les autres, finalement il semble que cela change avec la nouvelle représentation du corps et la passion du rythme qui a toujours fait partie de la nature humaine.

Nous devons souligner et insister sur le fait que la danse a toujours existé malgré le comportement social parfois contradictoire dans la société algérienne. Autrement dire la reconsolidation entre la nature de l’homme et le moi social.

L’évolution de la société algérienne dans sa totalité adhère aujourd’hui de plus en plus à l’identification du corps dans l’espace social, et lui donner sa valeur esthétique. L’interaction des cultures a permis au cours de la seconde moitié du xxem siècle d’intégrer cette nouvelle façon de voir le corps et maintenir le désir de l’exhibition. L’intercommunication des grands progrès techniques et scientifiques ont transgresse les tabous et les réticences d’une structures mentale conservatrice. La fonctionnalisation des éléments du patrimoine culturel traditionnels dans la création artistique a rendu encore le corps plus visible et musical, favorisant cette tendance à danser dans son propre rythme.

 les recherches socio anthropologiques sur la danse dans la société arabo-musulmane sont pratiquement très rares, du fait d’un inconscient collectif religieux omniprésent dans touts les comportements sociaux. Les prises de positions conscientisées par les préjugés sont toujours là, bloquent souvent l’expansion du désir de danser, de se libérer. Il est nécessaire aujourd’hui  que les pouvoirs publiques politiques prennent en considération cette immense partie de notre patrimoine culturel, le promouvoir encore davantage sans complexe et sans tabous. L’algérien a toujours dansé et dansera, mais il dansera mieux dans sa liberté.

                                                                                           Habib Boukhelifa

                  

 


 
 



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