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L’université, les conseils scientifiques et l’allégeance

 

Jamais, peut-être, l’université algérienne n’a atteint un stade aussi avancé de déliquescence. Les revendications restent souvent, en dehors de la production scientifique, absente des travées des établissements universitaires, engluées dans l’organisation de colloques et de journées d’études, sans lien réel, avec la vocation d’un espace de connaissance. Les revues, souvent sans consistance, n’apportent que trop peu de choses à une université se limitant à gérer les examens, brandissant continuellement des chiffres peu opératoires, marqués du sceau de la pauvreté et de l’ineffable. Peut-on parler de scientificité dans un univers où Internet est absent, les enseignants se trouvant sans bureaux, les « projets de recherche », sorte d’adresse ambulante. Ce n’est nullement surprenant de voir les universités algériennes occuper les dernières places dans les classements internationaux.

Certes, les nombreux départs d’enseignants algériens vers l’Europe, le Canada et les Etats Unis, ces derniers temps, a appauvri davantage cette université dépourvue des conditions minimales de travail, fonctionnant encore et toujours comme une sorte d’épicerie où il est peu correct, semble t-il, d’évoquer les questions scientifiques. Le fonctionnement de ce qu’on appelle communément « conseils scientifiques » ne correspond nullement à la vocation scientifique de tels comités aujourd’hui réduits à n’être le plus souvent que des lieux comptables obéissant aux désidérata d’une administration trop peu intéressée par les jeux réels de la gestion d’établissements à caractère scientifique et dont l’organisation est d’ailleurs catastrophique. Bourses bidon, rapports de soutenance faits à la va-vite, dont le temps de lecture se confond parfois avec le temps de la remise de la thèse, jurys de complaisance, jurys sans spécialistes de la question traitée dans la thèse, le plagiat est monnaie courante, publication d’articles dans des revues suspectes…constituent le lot quotidien d’une culture de l’ordinaire trop marquée par la complaisance et les jeux d’appareil. Nous avons, même été, témoin, de membres de jury qui ont déposé leurs rapports le jour même de la réception du document. En Algérie, c’est tout à fait normal au moment où les membres de certains conseils scientifiques ont appris, à l’instar de nos députés, à lever la main suivant celle du chef et à rédiger des communiqués de soutien et de tract. L’éthique et la déontologie à la poubelle. C’est démodé et c’est ringard, parait-il. Les membres de ce conseil, ignorant le plus souvent les textes règlementaires (notamment le chapitre 4 du décret du 17 aout 1998 régissant le fonctionnement des conseils scientifiques), méconnaissent leurs prérogatives et évacuent souvent l’administration des questions scientifiques, cherchant parfois à satisfaire l’espace administratif (département, doyen, rectorat) en allant dans son sens, jusqu’à rédiger des tracts ou des dazibao, qui ne sont nullement de leur ressort. Quand aura-t-on affaire à des débats scientifiques dans des universités où de nombreux enseignants demeurent encore prisonniers de la reproduction de cours jamais actualisés et d’articles ressemblant davantage à des exposés d’étudiants. Un fonctionnement démocratique de l’université, avec un système électif, rompant avec cette pratique trop totalitaire des désignations, favorisant l’allégeance et le clientélisme, pourrait permettre de sérieux changements qualitatifs.

En attendant, le plagiat fait des ravages, mettant dangereusement en péril le devenir de l’université, l’organisation actuelle de la direction de recherches et des soutenances favorise la complaisance, l’absence d’un regard réfléchi sur les programmes et la nécessité de leur réactualisation est un véritable danger pour la sécurité nationale, le manque de revues de qualité et de conditions minimales de travail engendre le déficit en publications importantes et en colloques, aujourd’hui dénommées « rencontres-zerdas » sans consistance réelle sur le plan scientifique. Ce sont là, les véritables défis de l’université, non ce texte administratif  restreignant tragiquement la liberté des chercheurs.
Nous tenterons dans les prochains textes de mettre en relief des cas particuliers et concrets illustrant ces dysfonctionnements.

                                                               Ahmed CHENIKI


 



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